Lettre de M. Nicolas Sarkozy, candidat à l'élection présidentielle, adressée aux Français de la France rurale, sur son programme en faveur des territoires ruraux, le 3 mai 2012.
Texte intégral
Mesdames et Messieurs,A quelques jours dun scrutin décisif qui engagera notre pays pour les cinq prochaines années, je tiens à vous faire part de ma conviction profonde sur lavenir et sur les potentialités de développement quoffrent les territoires ruraux.
Durant ces cinq dernières années, je nai cessé de sillonner notre pays afin de mimprégner de la richesse et de limmense diversité de nos territoires.
La plus grande partie dentre eux ne sont plus, depuis les années 90, des terres dexode. Ils accueillent, au contraire, de nouveaux habitants, qui viennent y chercher de lespace, du calme, de lauthenticité et un nouveau mode de relations humaines.
Cest pour répondre aux besoins de ces territoires que javais organisé, fin 2009, les Assises des territoires ruraux auxquelles plus de 80 000 personnes ont participé pour exprimer leurs attentes. Nous y avons répondus dès le printemps 2010 et nous y travaillons, depuis, sans relâche.
Ainsi, pour satisfaire les besoins des populations rurales, en matière demploi et de services, nous avons fait de léquipement numérique des territoires ruraux une priorité.
Sur le grand emprunt, nous avons consacré deux milliards deuros à léquipement numérique en très haut débit, dont 900 millions deuros sont affectés au projet de raccordement des collectivités situées dans des zones pour lesquelles les opérateurs privés nont pas pris dengagements dy déployer rapidement leur propre réseau. Parce que ces équipements sont stratégiques pour léconomie et la vie de nos territoires, nous accélèrerons le rythme des travaux pour réduire de plusieurs années le délai, fixé à lorigine en 2020, pour assurer la couverture des zones rurales les plus difficiles.
Nous poursuivrons, parallèlement, la politique que nous avons engagée concernant les pôles dexcellence rurale, qui ont permis de financer 652 projets exprimant les talents de ces territoires dans le domaine économique, culturel, touristique, etc De même, les dispositifs dexonération fiscale et sociale, dont bénéficient les entreprises nouvelles, les reprises ou les transmissions dentreprises artisanales seront maintenus dans les zones de revitalisation rurale.
Pour lutter contre la désertification médicale, nous ne contraindrons jamais les médecins à sinstaller dans certaines zones. Seule lincitation est efficace. Nous avons ainsi créé des bourses allouées aux étudiants qui sengagent à exercer leur activité, en milieu rural, pendant quelques années, et nous avons majoré de 10 % les honoraires des médecins qui sinstallent dans des secteurs géographiques sous-dotés. Cest pour faciliter aussi la pratique de la médecine de groupe que nous avons créé les maisons pluridisciplinaires de santé. Elles seront 700 à la fin de cette année 2012. Nous doublerons leur nombre au cours des cinq prochaines années. Cette politique commence à porter ses fruits, puisquil y a eu, lannée dernière, plus dinstallations en milieu rural quil ny a eu de départs.
Je sais combien vous êtes attachés, avec raison, à lécole de votre commune. Elle fait partie de lidentité des villages, et jai conscience que certaines fermetures de classes, lors des rentrées précédentes, ont pu être mal acceptées. Mais, à chaque fois, nous avons tenu compte des spécificités locales. Cest ainsi que nous avons maintenu, pour les classes en milieu rural, un taux dencadrement sensiblement meilleur quen zones urbaines (moins de 21 élèves par classe en moyenne dans le primaire contre près de 23 au niveau national) et, partout où cétait nécessaire, nous avons conservé les petites structures. Nous avons été particulièrement attentifs aux écoles de montagne, où un travail remarquable a été réalisé avec les élus locaux.
Mais, nous sommes aujourdhui arrivés au bout de lexercice : les économies qui pouvaient être faites sont derrière nous et à la rentrée 2012, comme je my suis engagé, le nombre global de classes sera maintenu au niveau national, et si je suis réélu, je mengage, à partir de la rentrée 2013, à exonérer totalement lécole primaire de la règle du un sur deux. Un nouveau souffle sera par ailleurs donné aux écoles rurales, grâce en particulier à la mise en commun des ressources pédagogiques, en poursuivant la logique du plan « Écoles numériques rurales ».
Sagissant des autres services à la population, nous devons reconsidérer loffre de services publics que nous pouvons garantir aux Français. Ne faisons pas croire que nous avons encore les moyens de financer des services publics sur tout le territoire. Notre devoir est dimaginer une nouvelle offre de services, telle que celle que nous avons construite avec La Poste, en garantissant 17 000 points de contacts dans des bureaux de poste, des agences postales ou des points multiservices chez les buralistes ou chez les commerçants. Ne vaut-il pas mieux bénéficier du service postal chez un commerçant qui ouvre tôt et ferme tard le soir, plutôt que davoir une offre de services dans un bureau ouvert quelques demi-journées par semaine, pendant les heures où chacun travaille à ses activités ?
Dans le même esprit, nous avons voulu mutualiser loffre de services publics en milieu rural. Cétait lessence de la charte des services publics que nous avons signée avec les grands opérateurs publics que sont EDF et GDF, La Poste, la SNCF et cinq organismes oeuvrant dans le champs social (Pôle emploi, assurance maladie, CNAF, MSA, et CNAV). Lobjectif est doffrir plus de services dans des points daccueil en territoire rural. Ce partenariat est actuellement mis en oeuvre dans 23 départements et près de 300 sites communs existent aujourdhui. Nous doublerons ces relais de services publics ruraux au cours des cinq prochaines années.
Pour réussir cette ambition que jai pour les territoires ruraux, il est par ailleurs nécessaire darrêter de faire peser sur eux des réglementations toujours plus contraignantes et toujours plus coûteuses. Ces réglementations découragent souvent les initiatives, notamment celles des maires des communes rurales, ou les acteurs économiques comme les artisans, les commerçants et les PME qui sont asphyxiés par lexcès de normes. Aussi, si vous me donnez la possibilité de faire un second quinquennat, lÉtat ne créera plus de nouvelles réglementations qui pourraient entraîner de nouvelles charges financières pour les collectivités locales. De plus, lorsquun ministre voudra créer une nouvelle disposition réglementaire simposant à des tiers, il devra accompagner sa proposition de la suppression de deux réglementations. Il ny a pas de solution plus radicale à linflation réglementaire. Mais, en plus, à chaque réglementation nouvelle, les ministères devront se poser la question de savoir si elles sont facilement applicables dans les territoires ruraux et proposer chaque fois que cela sera nécessaire, des dispositions allégées ou simplifiées pour la ruralité.
Si nous pouvons conduire ces politiques spécifiques et adaptées aux territoires ruraux, cest parce quils bénéficient en outre de toutes les mesures prises, au plan national, pour conforter lactivité économique.
En premier lieu, il y a lagriculture qui constitue le socle de lactivité en milieu rural.
La vie sy développe, elle est possible, parce que les paysages sont ouverts et cultivés. Il ny aurait pas dactivité économique, pas dactivité touristique, pas dactivité sociale, sans une agriculture puissante, modelant le paysage mais fournissant aussi des produits qui peuvent être le support dune activité ??conomique pour leur transformation et leur commercialisation, et qui peuvent aussi contribuer, par les signes de qualité quils portent, à limage et à la notoriété de ces territoires. Il sagit des vins dappellation dorigine contrôlée, des fromages, ou des produits de charcuterie.
Lagriculture est donc un secteur stratégique de notre économie qui explique mon engagement à défendre la politique agricole commune dont jai obtenu le maintien du budget qui lui sera consacré au cours de la période 2014-2020. Cela explique aussi les actions que nous avons mises en oeuvre pour mieux organiser les filières de production, faire bénéficier les agriculteurs de vrais contrats signés avec les entreprises auxquelles ils livrent leurs produits et connaître les mécanismes de formation des prix.
Nous avons voulu protéger les agriculteurs contre la volatilité des prix en portant cette question sur la scène internationale et nous avons enfin fait le choix dune agriculture tournée vers lavenir, conciliant la compétitivité et le développement durable. Dans ce cadre, nous avons réduit le coût du travail agricole (suppression des charges patronales pour les travailleurs occasionnels, diminution des charges de 1 par heure au niveau du SMIC pour les salariés permanents, suppression des cotisations familiales à partir du 1er octobre). Et avec le Grenelle de lEnvironnement, nous avons développé lagriculture biologique à laquelle nous consacrons 100 millions deuros par an et réduit de 87 % les pesticides les plus dangereux.
Enfin, sur le plan agricole, les crédits nécessaires à linstallation des jeunes ont été sanctuarisés et nous avons réduit la consommation des terres agricoles grâce aux Commissions départementale de consommation des espaces agricoles et à la taxe que nous avons créée sur les plus-values de cessions de terres agricoles et rendues constructibles. Jajouterai enfin, sur ce plan, que la majoration des coefficients doccupation des sols dans toutes les communes de France, votées récemment par le Parlement, aura un impact sensible sur la réduction de la consommation des terres agricoles.
Les territoires ruraux sont enfin largement bénéficiaires des mesures économiques générales, qui ont été prises, telle que la création de la contribution économique territoriale à la place de la taxe professionnelle, du crédit dimpôt recherche et de la TVA anti-délocalisation qui sappliquera à partir du 1er octobre prochain. Les nombreux déplacements que jai effectués en Province mont permis de mesurer limpact de ces mesures sur les entreprises que jai pu visiter et qui se maintiennent et se développent.
Jajoute, pour être complet que nos territoires ruraux doivent rester pour les populations qui y vivent des territoires sûrs. En conséquence, je tiens à la présence de la gendarmerie nationale dans les territoires ruraux. Je mesure combien nos concitoyens y sont très légitiment attachés. Je suis fier davoir organisé le rapprochement de la gendarmerie et de la police au sein du ministère de lintérieur, mais je veux réaffirmer que ce rapprochement nest pas et ne sera pas une fusion. Confortés dans leurs missions, respectés pour ce quils sont, les militaires de la gendarmerie nationale ne relâcheront pas leurs efforts de lutte contre la délinquance dans les territoires ruraux, pour assurer la tranquillité de nos concitoyens qui ont choisi dy vivre paisiblement. Le monde rural a droit à une sécurité adaptée aux spécificités de ses territoires et de ses populations.
Ainsi, je souhaite que dans nos territoires ruraux la gendarmerie développe un plan ambitieux de lutte contre les cambriolages des commerces, des résidences principales et secondaires.
Mes chers compatriotes, considérez cette lettre comme une marque de respect à votre égard. Je nai, bien sûr, pas pu y développer tous les thèmes qui me tiennent à coeur mais, au fond, mon message est simple : il ny aura pas de France forte sans une ruralité forte.
Le chemin que je vous propose nest pas celui de la facilité. Cest, au contraire, celui de leffort et du travail, qui sont des valeurs que vous connaissez particulièrement bien. Notre pays est à laube dun choix crucial pour lavenir de ses enfants. Nous ne pouvons pas nous tromper de direction.
Je vous remercie de votre confiance et vous assure de mon dévouement et de mon engagement envers les territoires ruraux et envers notre pays.
Source http://www.lafranceforte.fr, le 4 mai 2012
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